Route et chemin

Recueil de poèmes

Après la parution de Endroit en vert, des poèmes nés de la plongée dans Du haut de Mérigneux, un unique pastel de Danielle Ducreux*, j’ai continué d’être appelée par ses pastels ; cette fois par une dizaine de paysages. Ce dialogue intérieur que j’ai longuement nourri avec eux compose ce recueil, qui se termine par l’observation pénétrée de son atelier.

Sommaire : Route et chemin /  Petite maison de vigne /  Les Genêts / L’Étang du Roy  / Pierre-à-Chaux

*Danielle Ducreux est une artiste stéphanoise dont plusieurs des œuvres ont été acquises par le Centre Pompidou à Paris, les musées de Lyon, Grenoble, Saint-Étienne et les FRAC (Fonds Régional d’Art Contemporain).

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Extraits

 

il y a là

une frénésie d’air

et de lumière

en ce pastel

tant d’agitation

réelle

que tout, autour

dans la pièce

est rendu

à son irréalité

*

et que cet arbre un peu sévère

soit planté là dans le virage

ne doit pas inquiéter

mais conforter chacun

dans sa juste place

*

joie de l’air

boursoufflé de couleurs

le vert si jeune du pré

invite à le fouler

et à fouler

nos vies

*

doux fouillis de plantes

bordant le chemin

aussi légitime

que le chemin

bien que pas nommé

par un mot si simple et joli

anonymes fougères violettes

peut-être un peu cachées

doux ramassis

l’envie

d’y errer le regard

*

elle est venue là elle a cherché

un moment où était ce plan d’eau

et de ciel

après d’étroits chemins bordés de ronces

et de buissons sombres

s’est ouvert l’étang

du Roy

*

c’est le temps que tu peins

autant que l’espace

entre l’œil et l’eau

la terre et le ciel

*

tout au fond du monde

il y a un lac

qu’elle a surpris

en plein abandon

*

pourquoi les planches

des étagères de ce placard

– auquel il manque

mais ne manque pas

la porte

sont-elles peintes

en bleu ou rouge

irréguliers

il n’y a pas

de raison pas plus

que les paniers

ne furent placés là

pour décorer l’endroit

mais parce que

ils n’eurent pas de place ailleurs,

que l’ouvrage – quel ?

terminé, ils y furent entreposés

en attendant le retour

de la nécessité

*

des objets

déposés partout comme des vanités

célébrant

dans un silence sans fin

la fin de toute chose

et s’en moquant

et ne s’en moquant pas

attendant d’être écoutés

par la peintre

Anne Lauricella Pastel Danielle blot Ducreux1
© Danielle Ducreux, pastel